lundi 5 janvier 2015

Des voix de femmes - 1


Des voix de femmes d’ici et d’ailleurs, d’hier et d’aujourd’hui…

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Voyez, mes dames, comment ces hommes vous accusent de tant de vices de toutes pars. Faites les tous menteurs par monstrer vostre vertu et prouvez mensongiers ceulx qui vous blasment par bien faire.
(Christine de Pisan, Le livre de la Cité des Dames, 1402)

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Aucune époque ne posséda jamais une conscience aussi aigüe du sexe que la nôtre : les innombrables livres du British Museum, écrits par des hommes sur les femmes, en portent témoignage. La campagne des suffragettes est certainement responsable de cet état de fait. Elle a dû éveiller chez les hommes un extraordinaire désir d’affirmation d’eux-mêmes; elle a dû les inciter à accentuer leurs particularités d’hommes, leurs caractères distinctifs, ce à quoi ils n’auraient pas pensé s’ils n’y avaient pas été provoqués.
(Virginia Woolf, Une chambre à soi, 1929)

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Il n’y a peut-être pas d’indice plus déprimant de l’inhumanité qui caractérise l’esprit de suprématie masculine que cette tendance à refouler vers la classe dominée les traits humains les plus attachants : l’affection, la sympathie, la bonté, la gaieté. Parmi les caractéristiques que l’on qualifierait de fonctions féminines « nourricières », il y en a beaucoup que l’homme, semble-t-il, attribue à la femme parce qu’il ne les juge ni valables, ni utiles pour lui-même, et qu’il préfère rencontrer chez elle pour la simple raison qu’elles permettent à sa compagne de mieux subvenir à ses besoins à lui.
(Kate Millett, La politique du mâle, 1969)

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Moi, dit l’Euguélionne, j’ai subi le bain d’acide qui m’a révélée à moi-même et depuis ce temps, je ne puis supporter ma planète négative.
Si une femme a du génie, on dit qu’elle est folle. Si un homme est fou, on dit qu’il a du génie.
Transgresser, c’est progresser.
(Louky Bersianik, L’Euguélionne, 1976)

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Si je suis entrée dans la végétation c’est pour y faire surgir non pas le refoulé mais le déployé.
(Nicole Brossard, L’amèr, 1977)

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Je pense que, sans trop le savoir, quand, dans les années soixante-dix, nous avons soudain surgi sur la scène publique pour affirmer notre existence, nous avons désigné et assumé deux des enjeux majeurs de cette fin du XXe siècle et du XXIe siècle qui commence : celui de la transformation des rapports entre les sexes et de la transformation du régime de la génération et de la filiation. Même si nous n’avons pas mesuré dès le début l’ampleur du bouleversement que nous allions provoquer et/ou dont nous étions au moins le symptôme. Bien que je me défie de l’emphase, j’ose penser que nous – nous les féministes – avons été des actrices de l’histoire.
(Françoise Collin, Entretien avec Françoise Collin, Philosophe et intellectuelle féministe, par Florence Rochefort et Danielle Haase-Dubosc, 2006)


Andrée Yanacopoulo